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Pratiques commerciales trompeuses et e-commerce - Récentes applications italiennes
I. Pratique commerciale déloyale
En France comme en Italie, les pratiques commerciales déloyales sont interdites. On entend par « pratique commerciale » toute action, omission, comportement ou communication commerciale, y compris la publicité diffusée par tout moyen, qu'un professionnel met en œuvre dans le cadre de la promotion, de la vente ou de la fourniture de biens ou de services aux consommateurs.[1] Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire au principe de diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d’altérer le comportement économique du consommateur moyen (article L121-1 du Code de la consommation français et article 20 du Code de la consommation italien).
En Italie, c’est l'Autorité garante de la concurrence et du marché (AGCM) – équivalent de la DGCCRF en France – qui est chargée de surveiller les pratiques commerciales et de sanctionner les entreprises le cas échéant. Les signalements à l'AGCM peuvent être effectués via le site web, par courrier postal ou par courrier électronique certifié (« PEC »).
Comme en France, le droit italien subdivise les pratiques commerciales déloyales en deux catégories : (a) les pratiques commerciales trompeuses (ingannevoli), régies par les articles 21 à 23 du Code de la consommation italien et (b) les pratiques commerciales agressives, encadrées par les articles 24 à 26 du Code de la consommation italien. Seules les premières seront abordées dans cet article.
II. Pratiques commerciales trompeuses et e-commerce
La confusion créée par une pratique commerciale trompeuse peut porter, entre autres, sur la disponibilité du produit sur le marché, ses caractéristiques, son prix, les risques liés à son utilisation, etc. Dans le cadre du commerce électronique, les pratiques commerciales trompeuses peuvent également concerner les affirmations publiées sur le site web.
Voici une liste des pratiques commerciales trompeuses les plus fréquemment rencontrées dans le e-commerce :
III. Récentes décisions de l’AGCM en matière de pratiques commerciales trompeuses dans l’e-commerce
En mars 2025, la société Shiseido Italy S.p.A., opérant dans la production et la vente de produits cosmétiques haut de gamme, a été condamnée à 400 000 euros d’amende pour avoir diffusé une campagne publicitaire susceptible de créer chez les consommateurs une perception faussée de l'efficacité réelle et de la persistance dans le temps des produits solaires offerts à la vente. Étaient notamment en cause les slogans de la société, lesquels mettaient l’accent sur le fait que « la technologie révolutionnaire de Shiseido permet à l'eau, à la chaleur et à la transpiration de renforcer le voile protecteur anti-UV ». Selon l'AGCM, ces affirmations entraient en contradiction avec les précautions d'emploi indiquées sur l'emballage, selon lesquelles il était nécessaire de réappliquer le produit fréquemment, surtout en cas de transpiration et après chaque baignade, pour maintenir un niveau de protection solaire adéquat.
Pour plus d'informations, consultez : https://www.agcm.it/media/comunicati-stampa/2025/3/PS12788.
L’AGCM a infligé une amende de 8 millions d’euros au groupe de logistique GLS concernant son programme de développement durable « Climate Protect ». Il est ressorti de l’enquête que cette initiative avait été organisée, financée et communiquée sans la transparence ni la diligence requises pour des opérateurs d'un secteur très polluant comme celui du transport et de la livraison de marchandises. L’AGCM a également reproché aux sociétés du groupe d’avoir utilisé des termes ambigus (tantôt « compensation », tantôt « réduction » des émissions de CO₂, créant ainsi confusion entre deux activités n’ayant pas le même impact environnemental), ainsi que des déclarations insuffisamment claires, précises et vérifiables. De même, la publication d’objectifs n’ayant été atteints que postérieurement pouvait laisser croire, à tort, que ces résultats avaient déjà été réalisés au moment de la communication.
Pour une description plus détaillée des comportements en cause, consultez : https://www.agcm.it/media/comunicati-stampa/2025/2/PS12525.
En janvier 2025, l’AGCM a infligé une amende de 400 000 euros à la société Interflora Italia S.p.A. pour les comportements suivants :
- violation des délais de livraison « garantis » ;
- non-conformité entre le bouquet choisi et celui effectivement livré ;
- informations insuffisamment claires sur les coûts liés au service de livraison des bouquets.
Pour plus d'informations, consultez : https://www.agcm.it/media/comunicati-stampa/2025/1/PS12717-.
En juillet 2024, la société Funeraria Roma Capitale S.r.l., opérant dans le secteur des services funéraires, a été condamnée au paiement d'une amende de 30 000 euros par l'AGCM, pour les pratiques suivants :
- l’utilisation par la société de mentions telles que « POMPES FUNÈBRES ROME : AGENCE OFFICIELLE VILLE DE ROME » et « tarifs municipaux transparents », laissait entendre qu'elle opérait pour le compte ou en partenariat avec la ville de Rome ;
- l’utilisation de l’acronyme « AMA » (dans des mentions telles que « AMA ONORANZE FUNEBRI ROMA : SITE OFFICIEL » ou « SITES OFFICIELS AMA »), suggérait qu'il existait une relation de fourniture entre la société de pompes funèbres et l'Azienda Municipale Ambiente S.p.A. (également dénommée AMA S.p.A.), société détenue et agissant pour le compte de la ville de Rome ;
- l’association sur les moteurs de recherches entre la dénomination « AMA » et les sites de la société de pompes funèbres ;
- la publication, sur le site de la société, de deux vidéos d'ouverture dans lesquelles apparaissait le bouclier rouge avec le logo « SPQR » (emblème de Rome).
En mai 2024, l'AGCM a infligé une amende de 3,5 millions d'euros à Meta. L'Autorité a notamment constaté que Meta, en violation des articles 20, 21 et 22 du Code de la consommation italien, n'avait pas immédiatement informé les utilisateurs inscrits sur Instagram via le web de l'utilisation de leurs données personnelles à des fins commerciales.
Pour plus d'informations, consultez : https://www.agcm.it/media/comunicati-stampa/2024/6/PS12566.
Par décision du 18 avril 2024, l'AGCM a infligé une amende de 10 millions d'euros à Amazon, jugeant certaines modalités de présélection par défaut comme des pratiques commerciales trompeuses. À la suite d'une plainte déposée par un consommateur en avril 2023, l'Autorité a ouvert une enquête sur certaines pratiques adoptées par deux sociétés du groupe Amazon, Amazon Services Europe S.à.r.l. et Amazon EU S.à.r.l. L'AGCM s'est intéressée à deux types de pratiques : la présélection par Amazon de l'achat périodique d'une série de produits et la présélection de la livraison rapide payante.
Pour plus d'informations, consultez : https://www.agcm.it/media/comunicati-stampa/2024/4/PS12585.
En février 2024, l'AGCM a infligé une amende de 1 480 000 euros à Supermoney, fournisseur de gaz et d'électricité, pour avoir diffusé des messages publicitaires vantant les économies que les consommateurs pouvaient réaliser, via un site comparateur de prix, sans indiquer les critères utilisés pour ces calculs, ni le fait que Supermoney agissait en réalité en tant qu'intermédiaire/agent commercial pour le compte dudit comparateur.
Pour plus d'informations, consultez : https://www.agcm.it/media/comunicati-stampa/2024/2/PS12578.
En janvier 2024, Fileni Alimentare S.p.A., entreprise active dans le secteur avicole a été condamnée au paiement d'une amende de 100 000 euros par l’AGCM. Étaient en cause plusieurs communiqués publiés sur le site web de l’entreprise, portant sur :
- la durabilité environnementale de son activité ;
- ses projets de compensation des émissions de gaz à effet de serre ;
- la production agricole intégrale par Fileni (directement ou indirectement par l'intermédiaire d'agriculteurs sous contrat) des denrées/matières premières utilisées pour la production d'aliments biologiques ;
- l'origine entièrement italienne des denrées/matières premières destinées à l'alimentation des animaux.
Selon l'AGCM il s’agissait d’allégations environnementales trompeuses (s'inscrivant ainsi dans le phénomène du greenwashing).
En décembre 2021, l'AGCM a clos trois procédures à l'encontre d'Unieuro, LeroyMerlin et Mediamarket, leur infligeant une amende totale de 10,9 millions d'euros pour les pratiques suivants :
- diffusion d'informations inexactes et trompeuses concernant les délais de livraison, la disponibilité effective et les prix des produits vendus en ligne ;
- débit du paiement et réduction du plafond de carte bancaire avant la conclusion du contrat ;
- annulation unilatérale des commandes de nombreux consommateurs ;
- retard ou non-livraison des produits achetés et régulièrement payés par les consommateurs ;
- informations trompeuses sur l'état des expéditions des commandes ;
- retards et obstacles à l'exercice des droits de remboursement des consommateurs ;
- assistance après-vente insuffisante par rapport aux très nombreuses demandes des consommateurs (en particulier pendant la période de pandémie, où de nombreuses activités de service à la clientèle avaient été suspendues).
Pour plus d'informations, consultez : https://www.agcm.it/media/comunicati-stampa/2021/12/PS11770-PS11815-PS11839.
Cecilia Medri
Jeanne Deniau
Marco Amorese